(Transcribed by TurboScribe.ai - Go Unlimited to remove this watermark) Bonsoir à toutes et tous, bienvenue dans C'est le Moment, l'émission hebdomadaire
d'actualité du Média coopératif et citoyen Le Moment.
Je suis Danae Moyano-Rodriguez et dans l'absence de Benjamin, ce soir j'ai le plaisir d'animer
cette émission.
Nous sommes ensemble de 18h à 19h en direct sur nos radios partenaires Aligre FM et Radio
Campus Paris.
Ce week-end, l'émission sera rediffusée sur Vivre FM, mais vous pourrez aussi la retrouver
en replay sur notre site lemoment.org.
Cette semaine, à l'occasion de la Journée nationale de prévention du suicide, nous avons
beaucoup entendu parler du suicide dans les médias.
Pourtant, il s'agit d'un sujet qui est encore tabou, les chiffres du suicide sont en hausse,
notamment chez les jeunes entre 18 et 24 ans.
C'est un sujet difficile, donc qui nous amène ce soir, même parfois douloureux, mais
dont il faut absolument en parler pour mieux le prévenir.
Afin de répondre à cette situation alarmante, l'Union nationale pour la prévention du
suicide, l'UNPS, a lancé un appel pour réévaluer la place du lien social dans le phénomène
suicidaire.
Pour en débattre et aller plus loin dans les réflexions, et surtout pour essayer de
faire avancer les choses, le vendredi 9 février, l'UNPS organise un événement de haut niveau
au ministère du Travail, de la Santé et des Solidarités.
Quel est l'état des lieux du suicide en France ? Quelles ont été les conséquences
de la pandémie sur la santé mentale des Françaises et des Français ? Comment prévenir ? Autant
des questions auxquelles nous tenterons de répondre ce soir.
C'est le moment de parler de la prévention du suicide, donc restez avec nous, on est ensemble
jusqu'à 19h.
Et pour en parler avec nous, nous avons l'honneur d'accueillir des membres de l'Union nationale
de la prévention du suicide, l'UNPS.
On va l'appeler comme ça pour que ce soit un peu plus court.
L'UNPS, c'est une structure qui est aussi installée à Sésure avec nous, nous sommes
donc voisins.
J'ai le plaisir d'accueillir avec moi ce soir Françoise Fassi qui est une ancienne
directrice de recherche à l'INSERM en épidémiologie et santé mentale, vice-présidente aussi
de l'UNPS.
Bonsoir Françoise, comment tu vas ?
Bonsoir Danae, très bien en tant que voisine du programme Sésure et puis surtout en tant
que porte-parole de l'Union nationale pour la prévention du suicide qui depuis 28 ans
oeuvre pour à la fois mesurer, observer les phénomènes, essayer de les comprendre, les
partager et de mettre en place un certain nombre d'actions de prévention en partenariat
aussi bien avec des structures de communication comme au plateau urbain et le programme Sésure
que des acteurs de la santé, des professionnels comme Mathieu qui est là avec nous, comme
notre président Marc Fiatre qui est psychiatre à Tours.
Voilà tu annonces déjà notre deuxième invité donc le docteur Mathieu Luttmann, médecin
et sociologue, président du comité éthique et scientifique de l'UNPS.
Mathieu comment ça va ?
Ça va très bien, bonsoir Danae, bonsoir aux gens qui nous écoutent et je suis aussi
content d'être ici parce que l'UNPS a été mis en place pour lever le tabou, comme
tu l'as dit c'est compliqué et qu'il est important de pouvoir partager des réflexions.
La prévention du suicide ce n'est pas uniquement une affaire d'experts, c'est une affaire
de compréhension, de discussion avec tous les acteurs, la prévention est avant tout
quelque chose de citoyen aussi.
Oui complètement, merci à tous les deux d'être là avec moi, c'est vrai que c'est
un sujet qui est difficile, ce n'est jamais facile de parler de suicide je pense et même
de santé mentale.
Je trouve qu'on dit que le suicide est une question taboue mais même la santé mentale
en tant qu'enjeu de santé de manière générale c'est encore quelque chose dont on parle
assez peu je trouve.
Je ne sais pas si c'est partagé mais au moins c'est mon avis personnel.
Cette semaine on a entendu parler de quelques chiffres du suicide et surtout Santé publique
en France indique qu'il y a une forme de détérioration un peu générale de la santé
mentale.
Pour commencer, est-ce que vous pourriez nous dire en quoi ça consiste cette détérioration
de la santé mentale ?
En France, nous disposons d'un certain nombre de recueils statistiques, d'observatoires,
de baromètres qui nous permettent évidemment de suivre l'évolution non seulement des
opinions, on en a beaucoup plus l'habitude en France de suivre l'état des Français,
leurs opinions, mais également tout un dispositif d'enquête et d'études régulières qui
vont permettre de mesurer et notamment c'est Santé publique France, mais nous avons également
la Fondation de France avec le CREDOC et le ministère et l'Observatoire national du
suicide.
Donc des sources régulières de données qui vont permettre et puis bien sûr pour
la mortalité, l'INSERM qui va suivre les décès annuels pour toutes les causes médicales
de décès, mais également pour les causes violentes et bien sûr homicides, morts violentes
sans détermination vraiment quant à l'intention et suicides avérés.
Ces enquêtes vont nous permettre de mesurer, je vais vous citer simplement fin 2022 déjà,
Santé publique France montrait que 17% des Français montrent des signes d'état dépressif,
donc sept points de plus par rapport à une période maintenant hors épidémie.
Donc on a bien vu que toute la période Covid, crise sanitaire inédite, comme on l'a déjà
répété, avait largement détérioré un certain nombre d'états de santé mentale,
de la psychologie je dirais presque ordinaire jusqu'à des états beaucoup plus diagnostiqués
par rapport à une psychopathologie, et bien un certain nombre d'indicateurs qui sont
progressivement devenus alarmants.
Et là aujourd'hui, autant on va pouvoir enregistrer une baisse des suicides depuis
20 ans, puisqu'on est quand même largement descendu en dessous des 10 000 décès par
an.
C'était à l'époque le ministre Kouchner qui avait lancé ce message, il faut absolument
que la prévention des suicides fasse baisser ce chiffre de mortalité.
Mais nous avons aujourd'hui un certain nombre d'indicateurs qui, au-delà de cette baisse
régulière qui est enregistrée depuis une vingtaine d'années, montrent que la période
Covid a laissé beaucoup de traces et que aujourd'hui, et bien face à un certain nombre d'indicateurs
alarmants, nous devons considérer des groupes de la population et enregistrer non seulement
les constats, mais organiser des actions.
Et justement, tu parlais à l'instant de la pandémie et notamment des mesures qui
ont été prises pour lutter contre la propagation du Covid-19.
Est-ce que tu peux nous en dire un peu plus sur le type d'impact que cela a pu avoir
sur la santé mentale des gens ?
Eh bien, je vais prendre les résultats de la Fondation de France sur solitude et isolement.
L'isolement est mesuré de façon assez objective avec on vit tout seul ou on habite dans une
région ou je dirais une zone géographique qui est mal reliée en termes de mobilité,
en termes d'accessibilité même à des services de soins.
Donc, cet isolement aujourd'hui va concerner de façon assez objective dans les 14-15% de
la population, mais avec une grande variabilité suivant les régions.
Dans l'Allier, dans le Cantal, ce n'est pas tout à fait la même chose que dans le
département 91 ou 92 en Ile-de-France.
Par contre, la solitude, c'est un sentiment qui est ressenti.
Et cette solitude aujourd'hui, pratiquement un Français sur cinq dit souffrir de solitude.
Et la solitude, on sait très bien, mais je pense que Mathieu en parlera aussi tout à
l'heure, la solitude, elle peut être ressentie alors qu'on est dans des réseaux sociaux,
alors qu'on a des outils numériques qui nous inondent.
Et c'est TikTok et c'est...
Je ne vais pas en citer quelques-uns.
Tout le monde voit bien de quoi je veux parler.
Et on peut être relié, on peut avoir des amis à l'autre bout du monde, mais des amis
qui ne vont pas faire que le ressenti de la solitude, eh bien, soit évacué.
Cette solitude, je crois que ce n'est pas seulement l'isolement.
Il y a l'isolement des personnes âgées qui est objectif, qui est concret.
Il y a l'isolement d'étudiants qui vont se retrouver coupés de leur famille.
Mais le ressenti, le sentiment de solitude.
On peut l'avoir même dans la foule.
Justement, Mathieu, est-ce que toi, de ta double perspective en tant que médecin et
sociologue, est-ce que tu peux nous dire de la réflexion qu'est en train d'amener
Françoise autour de la solitude et de l'isolement ?
Je pourrais remondir sur la phrase qu'a prononcée Françoise.
On sait tous qu'on peut être seul dans une foule et on parle beaucoup de liens
sociaux. Et ce qu'on essaie un peu de pousser du côté de la sociologie, c'est des
interactions sociales.
C'est-à-dire qu'on peut avoir ce sentiment de solitude, mais
effectivement, être entouré et sentir seul parce que quelque part, il y a des pressions
sociales, parce qu'on a le sentiment de ne pas avoir compris.
La difficulté, finalement, c'est d'arriver à exprimer profondément ce qu'on a au fond
de nous-mêmes. C'est d'ailleurs pas par hasard que le fondement, l'apprentissage du
suicide, ce sont les associations qui font de l'écoute.
Et apprendre à parler, c'est compliqué.
En sociologie, on a un sociologue qui s'appelle Goffman, qui a étudié les rites
d'interaction. Comment on se comporte au quotidien ?
Et souvent, on parle de façade.
Et la difficulté, c'est qu'on va vouloir garder la façade.
Et une autre difficulté qu'on n'a pas souvent conscience, c'est qu'il faut un peu
accepter de demander de l'aide.
Et quand vous donnez la parole, c'est ce que j'aime bien à la sociologie, c'est qu'on donne
la parole à l'autre. Il y a les chiffres qui donnent une vision un peu globale.
La sociologie que j'aime bien, c'est la sociologie un peu micro.
On prend notre micro et on va donner la parole aux gens.
C'est ça qui est important.
Et il y a une étude qui monte, qui a été éditée dans une revue médicale qui s'appelle
Exercez, qui étudie la simple difficulté que j'ai à aller consulter un médecin
généraliste et aussi à accepter que le médecin généraliste conseille une
psychothérapie. Et c'est très, très compliqué.
Accepter. Il y a un intervenant qu'on en parlera, qui va présenter la chose.
Tout son travail, c'est d'accepter l'aide.
On voit bien que là, on rentre dans un jeu beaucoup plus complexe que les simples
indicateurs. Un individu ne se résume pas à son âge, son sexe, le fait d'appartenir
à une famille, son statut socio-professionnel.
Il a toute une histoire extrêmement complexe.
L'idée, c'est d'arriver à comprendre les récits de vie, ce que vivent profondément
les personnes. Et là, c'est beaucoup plus simple de faire ce genre de prévention.
Beaucoup plus complexe, je veux dire.
Justement, ce que tu es en train de nous dire, ça me fait penser au cas d'un ami
qui, justement, a beaucoup de difficultés avec cette notion d'accepter l'aide.
Il arrive à en parler.
Il est à un certain niveau conscient du fait qu'il a besoin d'un certain niveau
d'aide, mais il ne l'accepte pas.
Comment est-ce qu'on peut aider les gens, justement, à rentrer dans cette phase
d'acceptation qui, par rapport à ce que tu es en train de dire, me semble assez
essentielle, en fait ?
Un des paradoxes, c'est un sociologue que j'aime bien, qui s'appelle Alain
Rinkberg, qui a écrit un livre qui s'appelle La fatigue d'être soi, et qui
montre que l'un des grands métas, une des grandes injonctions de la société, c'est
d'être soi-même, d'être autonome.
D'où l'esprit que la dépression et qui sont en tant que maladie depuis 1945.
C'est extrêmement compliqué, une société qui valorise l'autonomie et qui
stigmatise la dépendance, donc la demande d'aide, d'arriver.
Donc, c'était une réflexion générale qu'on pourrait avoir au niveau sociétal,
et c'est un peu la sorte de sociologie, pour réfléchir à qu'est-ce que c'est
qu'être autonome, à quel moment donné j'ai le droit d'être fatigué.
Et là, c'est tout le travail de travail des généralistes, d'être
profondément à l'écoute. Et je dis souvent en tant que médecin, quand quelqu'un
ne va pas bien, moi je pose mon stylo.
Je sais que ma consultation ne va pas durer un quart d'heure, mais elle va durer
trois quarts d'heure. Donc, c'est à la fois tout.
Il y a aussi un travail de sensibilisation qui est fait par ce qu'on appelle les
sentinelles. Donc, c'est d'apprendre à écouter, d'apprendre à sortir, aller
en dehors des cas habituels, à générer en tant que soignant, mais pas
non plus soignant, en tant que citoyen, à sortir de nos routines, à sortir
des standards, à écouter, à essayer de comprendre ce qu'il y a derrière la
façade. Et les gens disent rarement je veux me suicider.
C'est un mot qu'on n'entend pas. Les gens disent j'en ai ras le bol, je suis
fatigué, j'ai envie de partir. Et quand on entend ça, partir où?
Qu'est-ce que ça veut dire? Et à ce moment là, on revient dans l'interaction,
dans l'accompagnement qu'on peut avoir tout un chacun.
Et puis, une fois qu'on a ça en tant que citoyen, surtout on ne reste pas seul
avec. On va discuter avec d'autres personnes.
On ne porte pas seul sur les épaules. C'est finalement une histoire de réseau.
C'est une histoire de groupe, c'est une histoire d'équipe.
C'est un début de réponse.
Oui, c'est super intéressant de commencer
à voir aussi la ramification du phénomène, la manière
dont ça va aller toucher non seulement les personnes qui sont
impactées par cette souffrance, mais aussi les personnes
au final qui sont dans leur entourage, puisque parfois, comme dans le cas
de mon ami, par exemple, moi, je me retrouve un peu dépourvue de solutions,
de possibilités aussi pour essayer de
l'aider ou de l'orienter, en moins vers les personnes qui pourraient l'aider.
Juste pour revenir un petit peu sur les populations qui sont touchées
par cette situation.
Est-ce qu'il y a des populations qui sont actuellement, tu évoquais les jeunes,
Françoise, est-ce qu'il y a d'autres populations qui sont particulièrement
touchées par cette hausse de
questions de suicides ?
Alors, dans les dernières données, ce qu'on a eu,
surtout après le Covid, on a montré les jeunes femmes
et les femmes d'âge moyen.
Et là, ça a vraiment fait écho avec
ce qui était déjà, je dirais largement,
médiatisé autour de la charge mentale
des mères de famille et de ces jeunes mères.
Et là, on a bien vu que l'impact Covid
avait finalement dépassé la stricte période,
c'est-à-dire que bien souvent, le retrait des familles, etc.,
avait entraîné une charge domestique
et du coup, une charge mentale essentiellement sur les mères de famille
et que toutes ces femmes pouvaient se retrouver
dans des situations très difficiles et de souffrance, évidemment,
psychique pour faire face à ce surplus de charges,
ce surplus de préoccupations et par rapport à elles-mêmes
et bien souvent par rapport aux enfants.
Et ça a corroboré d'ailleurs les chiffres en hausse des violences
intrafamiliales.
Et il ne faut pas oublier quand même, même si les indicateurs actuels
montrent bien, les plus jeunes qu'avant, 11-17,
moi, je me souviens, à l'INSERM, on hésitait toujours à travailler
avant 15 ans en étant, bon, un peu,
je dirais prudent par rapport à l'interprétation d'un certain nombre
de gestes sur leur intention.
Mais maintenant, je crois qu'il ne faudrait surtout pas oublier
que le taux de décès le plus important, c'est quand même
chez les personnes âgées et notamment chez les hommes.
Donc, vous voyez, autant j'ai insisté sur les jeunes adolescents,
on pourrait dire aujourd'hui, c'est les pré-adolescents sur lesquels
on pourrait avoir un œil vraiment très, très attentif.
Avec en plus, une mobilisation collective des différents acteurs
dans le domaine de la santé et de l'éducation.
Parce qu'à ces âges-là, on sait bien qu'il y a le médecin
et encore, il y a encore des médecins généralistes
et ce qu'on appelait les médecins de famille, ils existent encore.
Il y a un certain nombre de pédiatres, etc.
Et puis, il y a cette période de l'adolescence dont on sait très bien
qu'elle est compliquée.
On parle bien de crise adolescente
et ce n'est pas pour rien qu'on prononce ce mot crise.
Mais il ne faut pas oublier que dans les phénomènes suicidaires,
on a beaucoup parlé des agriculteurs.
Donc, on a les âges moyens de la vie suivant les secteurs d'activité
qui sont là aussi un pic, je dirais,
un pic en termes de charge sociale.
Parce qu'il y a la pression aux âges moyens de la vie.
On a deux pressions quand on fait un peu de démographie.
Eh bien, on sait que les âges moyens de la vie,
ce sont les supports pour une production de travail.
Ce sont aussi les supports pour les familles,
parce que bien souvent, les âges moyens doivent être concernés
par l'éducation des plus jeunes et par les soutiens aux plus âgés.
Et puis, j'allais dire pour terminer, et je te laisse la parole, Danae,
on a nos aînés et on a vu combien au moment du Covid,
on a parlé des EHPAD, on a parlé aussi de toutes ces personnes âgées
qui se retrouvent isolées,
mais pas seulement dans un ressenti de solitude,
mais isolées vraiment.
Et là, isolées parce qu'elles sont en EHPAD, mais isolées aussi
parce qu'elles sont dans des zones géographiques tellement appauvries
en termes de moyens de communication, de moyens de déplacement.
Et on a ces différentes catégories d'âges sur lesquelles
on ne doit pas baisser le niveau d'attention et de vigilance.
Justement, c'est là où je voulais en venir,
peut-être pour faire un point sur la question de la prévention.
J'imagine que ces différentes populations que tu es en train d'évoquer,
Françoise, mais aussi par rapport à ce que tu disais, Mathieu,
j'imagine qu'il y a différents acteurs de la prévention
qui se spécifient dans différents types de publics.
Comment est-ce que ça fonctionne ?
Je voudrais vraiment remonter sur ce que disait Françoise.
On a un petit biais quand on fait des préventions.
On dit souvent qu'il y a un peu des idées reçues sur le suicide
et c'est vrai qu'on dit suicide égale jeûne.
On a tendance vraiment, vraiment à oublier que les gros bataillons,
c'est les âges moyens.
Je voudrais revenir là-dessus, c'est les 30-60.
J'insiste sur l'idée, c'est ceux qui portent tout.
Comme disait Françoise, ils portent les cadets et les aînés.
On a tendance vraiment à les oublier.
Quand on développe la prévention, on fait une démarche précise sur les jeunes.
Sur les aînés, ça commence de plus en plus.
Mais on découpe un petit peu en travailleurs, en agriculteurs.
Mais on n'a pas pensé, je pense, à une prévention générationnelle
entre les 30 et 60 ans.
Et je pense que si on devait vraiment développer les choses dans l'avenir,
c'est vers les 30-60 ans.
C'est vraiment le point le plus important que je voudrais souligner.
Parce que ça, on a tendance à les oublier.
Après, il y a effectivement, au sein des écoles, il y a les infirmières.
On développe toute une série de psychologues.
Effectivement, il y a même, je pense, depuis un certain temps,
chez les étudiants, parce qu'on est chez les étudiants,
l'accès à 8 ou 10 consultations de psychologues gratuites.
Donc ça, c'est déjà un point important.
On développe effectivement, pour les personnes âgées, à travers,
heureusement, il y a eu l'événement de la canicule.
Depuis il y a quelques années, on a pu développer des gériatres.
Et là aussi, il y a tout un secteur qui se développe.
Et par contre, là où j'aimerais vraiment aller un peu plus loin,
c'est tout ce qui peut se faire sur les...
C'est une grosse bataille entre 30 et 60 ans.
Et là, on n'a pas encore de prévention spécifique.
Et on fera un focus sur la souffrance au travail.
Et là, c'est vraiment très, très, très important.
Il y a un autre isolement dont j'aimerais parler, que Françoise n'a pas parlé,
et j'en parle parce que je suis médecin généraliste,
c'est l'isolement aussi des soignants et l'isolement aussi des acteurs sociaux.
C'est pour ça qu'on a développé des formations sentinelles,
parce qu'à la limite, en tant que soignant, moi, je suis un peu confronté.
Mais comme la demande peut être adressée à n'importe qui.
Et on pouvait travailler, je ne sais pas, dans une caisserie sociale
et pouvoir adresser cette demande-là.
Et les gens sont un peu dépourvus.
Donc, ne pas oublier... C'est un peu d'ailleurs ce que tu disais tout à l'heure.
Toi, on te pose la question et tu ne sais pas ce qu'il fait.
Et donc, ça se développe petit à petit.
Il faut quand même le signaler dans les tas des lieux.
Il y a quand même des nouveaux dispositifs qui se mettent en place.
Donc, il y a le 31-14, on peut appeler ça.
C'est tout à fait nouveau.
C'est important, c'est en place depuis un ou deux ans.
Il y a ce qu'on appelle aussi quelque chose de tout à fait nouveau, qui est vigilance.
Parce qu'avant, tu faisais une tentative de suicide,
tu arrivais aux urgences et puis tu partais et puis il ne se passait rien.
Donc maintenant, il y a un dispositif de réappel.
Des choses comme ça.
Mais par contre, et là, c'est un paradoxe.
On développe des nouveaux dispositifs pour mieux accompagner la prise en charge du suicide,
pour éviter le passage à l'acte.
Mais en même temps, il faut quand même qu'on en parle.
Une sinistrose de la psychiatrie.
Honnêtement, quand j'appelle pour adresser en urgence,
souvent le premier réflexe que nous faisons des psychiatres,
c'est qu'on est épuisé, on est isolé, on n'a pas de rendez-vous.
Et donc, à la fois, on développe une manière de repérer,
mais ça devient compliqué d'orienter.
Donc, il faut vraiment penser à la fonction du suicide,
pas uniquement qu'on évite le passage à l'acte,
mais quelque chose d'un peu global.
Comme disait un petit peu Marshall Moore,
un fait social total, il faut la penser dans sa globalité
et pas uniquement sur un point très précis.
Quand je suis médecin généraliste, ce qui m'intéresse,
c'est pas uniquement d'éviter le passage à l'acte,
c'est de savoir ce qui se passe après éventuellement.
C'est toute cette approche globale.
Mais oui, bien sûr.
Et je pense qu'un point important que je soulève,
un peu par rapport à ce que vous êtes en train de dire tous les deux,
c'est au final, c'est les personnes qui prennent soin,
c'est celles qui s'occupent des autres.
Tu parlais, Françoise, des femmes, des mères notamment.
Toi, tu parles des soignants, Mathieu.
Je pense que c'est intéressant aussi de s'intéresser à ces personnes
qui sont là en charge de prendre soin des autres.
Et puis, c'est vrai que souvent,
elles sont un petit peu oubliées quand on parle de ces choses-là.
Donc, avant de poursuivre,
on commence à rentrer déjà dans le vif du sujet de la prévention.
Avant de poursuivre, on va faire une petite pause.
Donc, ce soir, je vais vous proposer moi-même une programmation musicale
à la fois féministe, hispanophobe,
hyphénophone, pardon, et surtout joyeuse.
Ce sont les chansons que j'aime écouter
quand j'ai besoin d'un petit coup de boost moi-même.
Et donc, pour commencer,
El amor de mi vida de la rappeuse guatemalteque Rebeca Lane.
Comme si tu écoutais mon esprit
Après cette expérience
Je n'accepterai pas un amour avec des faiblesses
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des personnes en souffrance
Françoise, tu as évoqué un chiffre intéressant
Est-ce que tu peux nous le raconter ?
Oui, les données actuelles montrent
qu'un décès par suicide
impacte 6 à 14 personnes dans l'entourage
et va exposer en moyenne plus de 130 personnes
Donc vous voyez l'impact
Parce que moi, je me souviens très bien
que pour certains épidémiologistes
les décès par suicide, c'est 2%
de la totalité des décès par an
Donc c'est très faible
Mais quand on commence à regarder de près
autour d'un acte tel qu'un décès par suicide
vous voyez la propagation
C'est vraiment de la déflagration
qui peut y avoir dans l'entourage
proche, mais aussi peut-être plus éloigné
Un milieu professionnel va être impacté
par un des collaborateurs qui se suicide
Un milieu de vie
On travaille beaucoup à l'UNPS avec le milieu carcéral
Un suicide en prison
impacte énormément d'autres détenus
Impacte les professionnels qui sont là
Impacte notre société en général
Et je crois que depuis les dernières questions
qu'on vient de se poser
certes, il y a des professionnels
Mais il y a tout cet environnement
ce milieu de vie
dans lequel chacun de nous se trouve
et à différents moments de la vie
à différents moments même de la journée
Et là, c'est vraiment le milieu de vie
qui doit pouvoir être sensibilisé
Ne pas faire semblant de
j'ai rien vu
ou bien c'est banal
ça arrive, j'y peux rien
Non, non, non
Chacun de nous peut être attentif
Chacun de nous, comme dit Mathieu
on écoute
Mathieu, tu voudrais rajouter quelque chose ?
Écouter et j'ai envie de poser la question
Parce qu'il faut accepter l'idée
qu'on a beaucoup d'incertitudes
Le suicide reste profondément une énigme
C'est extrêmement compliqué de savoir pourquoi
On a des chiffres
On sait que les dépressifs
les veuves, les personnes isolées
se suicident le plus
Mais heureusement, la plupart des personnes dépressives
la plupart des veuves ou des gens célibataires
où on se trouve sur le travail
ou on a vu dans la France dans les comms
ne se suicident pas
Donc c'est compliqué
Il y a une part d'énigme
Un suicide, c'est une conjonction très complexe
C'est pour ça que c'est difficile
On n'a pas de prédiction claire
Donc si quelqu'un évoque ça
Il y a écouter et oser poser la question
Et il y a un tabou
Parce qu'on a peur
On se demande que si je demande à quelqu'un
Qu'est-ce que tu y penses ?
On tourne autour du pot
On a peur de prononcer le mot suicide
Et on dit j'ai prononcé le mot suicide
et je vais donner envie à la personne de se tuer
Et ça, c'est à bien savoir qu'on a mis en place
Non, au contraire
On a parlé de la façade tout à l'heure
Si on ose poser la question
Ouf, quelqu'un a compris que ça n'allait pas bien
Quelqu'un ose franchir un petit peu cette façade
Et c'est soulageant qu'on pose la question
Après, en tant que médecin généraliste